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« Les sportifs montrent la valeur de l’engagement »
Flora Vautier, sportive paralympique, nous raconte le rôle clé de l’engagement dans le sport.
Quel est votre parcours ?
J’ai commencé le tennis de table à la suite d’un accident de voiture, il y a sept ans. Cela fait trois ans et demi que je pratique ce sport à haut niveau, à Nîmes. Quand j’ai participé aux Jeux de Paris 2024, à 19 ans, j’étais la plus jeune parmi toutes les filles en fauteuil. Aujourd’hui, je prépare les JO de 2028 et les compétitions majeures : championnats d’Europe et championnats du monde.
Vous avez été lauréate de la Fondation Banque Populaire un an avant les Jeux. Pourquoi avoir candidaté ? Quelle est la nature de ce soutien ?
C’est un soutien financier important pour pouvoir se lancer dans une carrière. Dans le handisport, il n’y a pas de sportifs professionnels. Il faut donc trouver des soutiens pour avoir les moyens de s’entraîner, de se qualifier et de participer à des compétitions internationales. J’apprécie d’être soutenue par une grande structure avec laquelle nous partageons un même état d’esprit et les mêmes valeurs. La fondation est très disponible, nous échangeons avant et après chaque grande compétition.
Vous avez remporté une médaille de bronze pendant les JOP 2024. Les Jeux Paralympiques ont-ils contribué à faire évoluer la place des personnes en situation de handicap dans la société ?
Le fait d’avoir eu les Jeux Olympiques et Paralympiques « à la maison » a été une étape très importante pour changer les regards. Les spectateurs français qui n’avaient pas eu de places pour les JO sont venus assister aux Jeux Paralympiques pour défendre les sportifs tricolores. Et finalement, ils ont tout autant aimé ! Les gens ont réalisé qu’il était possible de vivre tous ensemble des émotions intenses avec le handisport, autant qu’avec le sport valide, et que nous étions tous égaux sur ce plan.
En quoi le sport est-il un bon vecteur pour changer les regards et faire avancer les choses ?
Les sportifs montrent la valeur de l’effort et de l’engagement. Nous travaillons tous les jours à l’entraînement, de façon acharnée, avec l’objectif de jouer un match qui va durer, selon les disciplines, quelques dizaines de minutes, parfois moins. En voyant nos émotions, quand on gagne ou perd, le public réalise les sacrifices consentis et le travail fourni.
Quelles sont vos initiatives ou actions au niveau local, à Nîmes où vous vous entraînez ?
La ville organise de nombreuses journées handisports. On sollicite ma venue pour des démonstrations. À l’université, je participais à des séances de sensibilisation, l’inclusivité était bien pensée. À Nice, d’où je suis originaire, je suis allée souvent dans les écoles. Je m’y rends encore régulièrement, et je connais beaucoup de sportifs qui font de même. Les enfants nous posent des questions concrètes sur le handicap, les messages passent plus facilement. Il faut parler du handicap et du handisport le plus souvent possible. Les gens ne doivent pas avoir de tabou, il faut oser venir nous voir et nous poser des questions, discuter avec nous !
Le handisport a besoin de modèles. Vous sentez-vous l’âme d’une ambassadrice ?
Il faut des modèles, oui ! C’est mon objectif à terme, je le fais déjà en partageant mon parcours, en racontant ma vie sportive et extra‑sportive. Il est important que les personnes qui deviennent handicapées puissent voir que d’autres avant elles ont réussi à mener un projet personnel ambitieux. Ce message s’adresse aussi aux parents dont l’enfant naît handicapé et qui sont souvent désemparés. Moi, quand j’ai eu mon accident, j’ignorais tout du handisport. Mais pour devenir une ambassadrice, il faudra continuer à avoir de bonnes performances en compétitions, évidemment !
Quelles valeurs aimeriez-vous incarner ?
Cela peut surprendre, mais la première des valeurs à incarner, pour moi, c’est la féminité. Il est très rare de voir une femme qui prend soin d’elle en faisant du sport tout en étant en situation de handicap. C’est la première chose que j’essaye de mettre en évidence chez moi. Certains voient d’abord mon fauteuil. Je préfère qu’on se dise : « Tiens, elle a des beaux cheveux ! » Je ne vois pas beaucoup de sportives handicapées s’apprêter avant un match. Or, on peut défendre l’idée de se sentir bien y compris dans ces circonstances. Ensuite, évidemment, la persévérance et la ténacité sont des valeurs indispensables dans le sport